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Affichage des messages du juillet, 2021

LE CAHIER PHILOSOPHIQUE - 53ième partie

  PASOLINI (SUITE) Le monde des objets perçus ne figure pas tout le réel mai s e n  constitue la partie avancée; la destruction des objets par obsolescence et imitation entraîne celle de l’insurmontable et, au-delà, efface le manque, l’éloignement, l’altérité infinie de l’Autre.  Cet autre n’est jamais totalement atteint (comme une a cti o n dans le monde humain n’épuise jamais son intention) et peut-être n’est-il jamais totalement visé.  Le désir vise autrui dans l’ouverture, par la séparation et aussi par le manque.  Ce qui nous divise est ce qui nous lie, l’absence illumine la présenc e,  l e visible n’affirme pas une positivité mais est une station du voyage de l’invisible dans l’apparaître.  L’objet, par la distance et la séparation qu’il instaure remet en question le Même. Le paradoxe tient en ceci que la durabilité du monde des objets  in d uit la stabilité de l’action humaine du rapport sujet-objet, en maintenant en vie le conflit et la sé...

LE CAHIER PHILOSOPHIQUE - 52ième partie

 PASOLINI (SUITE) Pasolini lui attribue u n  rôle déterminant dans la production de cette “nouvelle humanité”.  La consommation est mise à mort, elle figure le mal qui revêt les oripeaux de l’embourgeoisement.  La production de s c orps et des mentalités analogues disqualifie toute tentative de situer la bourgeoisie du Welfare State comme classe sociale (Pasolini donne aussi l’impression de prononcer un diagnostic ontologique).  Elle apparaît bien plutôt comme maladie contagieuse,  ca ncer.  Sous sa critique le bourgeois se révèle un vampire qui suce le sang de ses victimes, celui des jeunes des borgate, des étudiants, des ouvriers, des mères et des frères qui deviennent à leur tour vampires.  Cette vampirisation de masse est de natu re  terroriste et répressive, elle dévitalise et enlaidit.  Toute cette suite de mises à mort qui s’effectuent dans le welfare state découlent de la mort du sacré, de l’altérité et de la séparation.   L...

LE CAHIER PHILOSOPHIQUE - 51ième partie

PASOLINI (SUITE) De cette intuition pasolinienne j’en déduis, quant à moi, que le monde des objets neutralise le pouvoir.  Ce monde est celui de la  rivalité et du mystère, il engendre un rituel qui se déroule en dehors du pouvoir même s’il advient que ce dernier le contrôle. En ce cas le contrôle n’affirmerait rien de plus qu’il s’agît de contrôler, à partir d’un lieu, d’un centre, une périphérie, une  forme extérieure.  La rivalité, le conflit qui naissent du monde des objets échappent à l’État, au Pouvoir.  Il faut comprendre le Welfare State non seulement comme pourvoyeur-dispensateur de travail mais surtout comme socialisation de l’objet - c’est pou rquoi la foule y demeure solitaire.  Le Nouveau Pouvoir ne renvoie plus au contrôle de l’État mais se réalise comme pouvoyeur d’objets technicisés tels que la télévision, l’ordinateur et la voiture, dans lesquels la foule contemple, fascinée et séduite, so n image (1).  Par la même occasion, l’accroiss...

LE CAHIER PHILOSOPHIQUE - 50ième partie

 PASOLINI (SUITE) Cinéma de poésie, empirisme hérétique, passion du réel, inconoclastie tragique, fascination de l’objet - tout cela désigne une rebellion profonde et enracinée chez Pasolini.  La consommation hédoniste tue l’ambivalence de l’objet, son rayonnement, son sens caché, son mystère.  La fin de l’objet c’est la tyrannie du signe et la déréalisation du monde -  c’est la perte de puissance qui habite le monde, puissance qui surgit du sacré et se manifeste par lui.  Perte de puissance de l’individu branché sur les flux du Pouvoir.   Les usagers n’utilisent rien mais consomment de la mort. Derrière l’objet se tenait le domaine invisible des choses, s’indiquait un territoire de l’indéterminé.  L’obsolescence des objets ne tue pas seulement leur utilité (donc leur détermination sociale au niveau des besoins) mais la possibilité de rencontre avec le sens et celle du sacrifice car ne se consume que ce qui sert.  En définitive se trouve abolie la...

LE CAHIER PHILOSOPHIQUE - 49ième partie

PASOLINI (SUITE) La désobéissance “opérationnalisée” n’est-ce pas une idée profonde de Pasolini? La prise directe, la fin de la mise en scène.  La vie se démocratise et exciper de ses droits démocratiques est devenu un devoir démocratique si l’on consent à la réalité, si l’on balbutie “plutôt rouge que mort”, si l’on s’acclimate à l’inaptitude à la joie, si l’on se joint au silence des démocraties face au drame polonais, si l’on s’assume comme vrais criminels aux mains blanches.  La démocratie croît en même temps que le désert, au rythme des capacités informatives.  Hans Jürgen Syberberg qualifie cela de “démocratie hydrochoris” et se demande si l’on peut encore être sauvé parce que “pour être sauvé, il faut avoir perdu une chose et traversé l’épreuve de l’autre”.  Nous n’avons pas seulement perdu l’objet mais aussi le sentiment de la perte tout court.   Ainsi le réel lui-même est socialisé, en ce qu’il s’offre “ready-made” tout entier à la consommation directe....