LE CAHIER PHILOSOPHIQUE - 35ième partie

LA PERSONNALITÉ 


Pour Maslow, le projet de réalisation de soi est forcément ajourné. La priorité est d’entreprendre une psychothérapie.

En second lieu, expliquait Maslow, il y a les personnes qui, par une espèce d’autocensure, se défendent contre leur propre désir de réalisation de soi.

Elles se laissent gagner par la paresse, la léthargie, le contentement de soi, la résignation. Elles ont peur de croître, peur d’affronter la normalité, peur de s’élever.

Elles exercent une sorte de répression sur leur autoréalisation. Maslow n’hésitait pas à faire usage, à leur propos, du concept de « résistance ».

En psychothérapie, la résistance désigne, le mécanisme plus ou moins conscient par lequel le sujet s’oppose à sa sexualité, à ses émotions, à ses souvenirs traumatisants. Mais soulignait Maslow, il y a une autre forme de résistance qui concerne la réalisation de soi : une résistance qui s’oppose à nos besoins, idéaux, à notre aspiration à la vie supérieure. « Il y a, écrit Maslow, la résistance que nous opposons à notre propre croissance, une résistance qui consiste dans le refus du meilleur de nous-mêmes, de nos plus beaux désirs, de nos plus hautes possibilités, de notre créativité. En un mot c’est la lutte contre notre propre grandeur ».


C’est une résistance qui explique que le nombre des individus qui se réalisent pleinement est, en définitive, assez faible. Les « auto-actualisants » remarquait Maslow, ne constituent qu’une petite minorité. Il évaluait leur nombre à deux ou trois pour cent de la population… Mais s’empressait-il d’ajouter, le désir de réalisation de soi reste cependant présent chez tout individu, fût-ce sous une forme latente. Même quand il paraît éteint, il est toujours là, en veilleuse et, pourvu qu’on le veuille, il peut être réveillé. Tel est, justement, le but d’une démarche de développement personnel : ranimer ce besoin, réveiller notre désir de réalisation personnelle.

En postulant l’existence d’un désir spécifique de réalisation de soi, autrement dit d’une métamotivation, Abraham Maslow allait croiser inévitablement la psychanalyse. Celle-ci dispose en effet d’un concept qui, en première approximation, est identique à celui de métamotivation, il s’agit de la sublimation. Prenons le temps de comparer ces deux notions. Nous localiserons ainsi avec précision les points d’accord et de désaccord entre la psychanalyse et le développement personnel. Ce faisant, nous affinerons notre connaissance de ce dernier et nous comprendrons la raison pour laquelle les tenants du développement personnel et les psychanalystes éprouvent  tant de difficultés à dialoguer.

Freud définit la sublimation comme la force psychique qui pousse l’être humain à poursuivre des buts élevés, à s’investir dans l’art, dans la création dans la politique, dans la vie économique.

En incitant aux activités supérieures, la sublimation permet l’expansion, le dépassement de soi. Ainsi Lou Andrew Salomé, l’une des disciples de Freud, ne voyait pas de différence entre ces deux notions : ce qu’on appelle sublimation, écrit-elle en 1913, est par nature une réalisation de nous-mêmes.

Cependant, un examen plus approfondi révèle que ces deux notions ne sont pas superposables. Pour la psychanalyse, les activités supérieures par lesquelles se manifeste la sublimation sont le résultat d’une transformation des instincts inférieurs. Les buts élevés poursuivis par l’individu qui « sublime » sont toujours un produit dérivé de l’énergie érotique. Parce qu’ils ne peuvent pas , ou ne veulent pas satisfaire leur besoin sexuel, que le créateur, l’écrivain, le leader politique, le capitaine d’industrie, l’homme ou la femme d’action, se consacrent à des tâches d’un ordre supérieur.

Mais dans tous les cas, la pulsion sexuelle reste à la base de leur comportement. Elle constitue le facteur déterminant. les activités sublimatoires ne sont possibles qu'en vertu d’un détournement des pulsions sexuelles. La sublimation est une conversion de la libido. Elle est une énergie venue des étages inférieurs de la personnalité, le ça, lequel, par une espèce de métabolisation, se transforme en exercice du pouvoir, en activité économique, en création artistique, mais, en dernière instance, ces activités supérieures s’expliquent par l’inférieur.  Le Freudisme est un « réductionnisme ».


* À suivre *

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