PHILOSOPHIE - Émotion Et Sa Compréhension Au Niveau Physiologique, Psychologique Et Social - 7ième partie



Regard culturel sur les émotions

Ce piège de croire à l’absence d’émotions est omniprésent car les choses ne sont pas si évidentes au premier abord. Dans plusieurs cultures, le soma et le psyché sont deux niveaux qui s’interpénètrent. Les émotions ne sont-elles pas des pensées corporéifiées, chaudes, impliquant le moi, pour reprendre les expressions de Michelle Rosaldo (1984)? Le langage du corps comme tout langage peut-être, est métaphorique. Les références au cœur, au foie, aux intestins renvoient à un vécu profondément émotif. Certaines théories ethnopsychologiques sont très explicites à cet égard : chez les peuples quichuas des Andes, le cœur est le centre de l’être, le sang est le souffle de la vie. La tristesse est assimilée aux battements du cœur.


Le contexte situationnel des émotions

L’identification d’une émotion, que ce soit par le thérapeute ou par le client, est interprétation; la démarche consiste à donner un sens à une série de signes biologiques, à des expressions corporelles, à des intonations de la voix ou à des situations. L’empreinte d’une socialisation culturelle est déjà hautement présente dans ce processus essentiellement cognitif. Entrer dans la vie émotionnelle des gens ne peut se faire sans pénétrer le monde de leur culture ou celui des significations associées aux événements de la vie. Prenons ici un exemple. Si l’on veut comprendre l’anxiété récurrente d’un Haïtien, il faut savoir identifier les types de situations qui peuvent habituellement provoquer dans cette culture des états d’anxiété. Certains indices pourraient facilement permettre à l’observateur familier avec la culture de savoir qu’il s’agit de l’appréhension d’une attaque de sorcellerie imminente. Il faut alors bien comprendre le système de sorcellerie pour savoir si le client présente une anxiété normale en fonction des attentes culturelles ou si cette anxiété déborde dans un délire paranoïaque bien structuré.

De même pour lire les signes qui peuvent se cacher dans les replis des malaises somatiques, il faut à nouveau connaître le non-dit d’une culture. Dans la communauté Noire de l’Équateur, les rapports de force à l’intérieur d’une famille ne permettent pas à la femme d’exprimer à son époux ses sentiments négatifs. Le seul recours qui lui est offert est la déclaration d’une maladie affectée ou réelle. Dans ce cas ici, il n’y a pas au sens strict de somatisation puisque la femme est bien consciente de ses sentiments de rejet mais se conforme à la règle de ne pas les nommer. 

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