PHILOSOPHIE - La Mort - 13ième partie


La Mort Chez Le Vaudouisant Haïtien

Mais, et qui sont « les morts »?

On ne peut en parler qu’en interrogeant la thanatologie vaudou. En effet, de même que l’espace, pour le vaudouiste, n’est pas seulement ce « lieu bien clos où l’homme élit sa résidence et fait son nid »; que le temps n’est pas cette chose « circonscrite, arrondie, stérilisée par la clôture de la mort » et que les deux réalités s’ouvrent par en haut, la mort aussi est une chose ouverte. En effet, si nous mettons en œuvre une interprétation des conduites nécrologiques recensées, nous découvrons partout l’idée de métamorphose et de persistance existentielle au-delà de l’instant létal. Le fait d’armer la dépouille mortelle après la toilette mortuaire pour une éventuelle défense contre des ravisseurs possibles, celui de lui confier des messages pour l’arrière monde où le défunt est censé rencontrer les parents et les amis déjà décédés sont des signes non équivoques d’une croyance à l’au-delà.

Mais prenons les choses dans l’ordre et disons tout de suite avec Jean Caseneuve que la mort ressortit au numineux impur. L’on se rappelle que ce même auteur, répétant Rudolph Otto, a défini le numineux comme : « ce qui fait qu’une chose, un être, ou un évènement se présente comme mystérieux, et comme révélant qu’il y a autre chose que le simple donné ».
Nous voici donc en dehors de la condition humaine normale et des règles par conséquent! Et dès lors, le numineux sera à la fois « attirant comme tout ce qui est puissant, inquiétant parce que mystérieux et irréductible aux normes usuelles ».

La mort étant « dans la destinée de l’homme la manifestation la plus implacable de son impuissance à se maintenir dans les règles qui le rassurent traduit » le contrôle de la situation numineuse. En effet, point de tangence entre l’en deçà et l’au-delà, appartenant à ce monde ici, « en tant que phénomène localisable ou évènement d’état civil, à l’autre » monde en tant que le défunt est instantanément perdu corps et âme… », la mort, par son côté anormal est perçu comme une chose impure (comme la folie, comme la colère) l’homme tentera donc de s’en protéger par des rites de tout calibre destinés à rétablir l’équilibre souhaitable.  
Voyons donc quelles sont les parades que le vaudou met en œuvre pour affronter cet «  ordre extraordinaire » qu’est la mort.

L’inquiétant et l’impur:

Pour bien comprendre les réactions du voudouiste devant la mort, il faut remonter à son comportement devant la maladie. En effet, si les maladies banales, trop communes pour être l’œuvre de mauvais esprits ou de sorciers… sont appelées « maladie du Bon Dieu », en revanche,  la maladie importante ou soudaine sans cause immédiatement assignable ressortit certainement aux maléfices d’un ennemi et fait prendre le chemin de la divination. Si la mort s’ensuit, elle est en l’occurrence la conséquence de la méchanceté sorcière ou d’une transgression d’interdit surnaturel.
Mais ce type de mort constitue un cas extrême. En réalité, c’est n’importe quelle mort qui est ambiguë et dangereusement chargée. 

* À suivre*

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