PHILOSOPHIE - La Mort - 12ième partie

En fait, il s’agit avant tout de partager. Aller à la veillée, cela signifie aussi soutenir la famille, lui porter réconfort, consolation, éviter qu’elle ne reste seule. C’est aussi rester éveillé pour éviter l’utilisation du mort à des fins maléfiques. En conséquence, le défunt est toujours gardé par au moins un membre de la famille.
Même si le corps physique n’est plus là, l’âme, l’esprit sont présents et c’est eux qu’il faut délivrer par le biais de la prière en commun. Il faut les libérer du péché, « les alimenter » pour les aider à sortir de la maison et trouver leur chemin. C’est le dernier voyage, le départ vers l’au-delà. C’est une sorte de pénitence. Pendant 9 jours, la personne erre, « ramasse ses traces et ses crasses ».
Prier pendant 9 jours, c’est aussi une coutume, une habitude, une superstition. Il paraît que le chiffre impair 9     a une signification particulière. Les gens qui ne participent pas à la prière des 9 jours disent qu’ils ne peuvent rien pour le « disparu », qu’il est mort et fini.
Le neuvième jour pour certains disent aller à la messe pour « liquider tout » avec le mort, pour placer son esprit en paix près de dieu. C’est un laissez-passer qui prendra effet définitivement au bout de 40 jours. Personne ne voit l’esprit du défunt puisqu’il dérive, il peut faire peur.
Pour partager la peine et remercier les gens qui ont soutenu la famille, il est fait référence au pain que Jésus-Christ a rompu après sa résurrection avec les disciples d’Emmaüs.
Donner à boire et à manger après la messe du 9e jour est pour certains une tradition plus tenace en Grande Terre qu’en Basse Terre.
Pour les évangélistes, ils parlent essentiellement de superstition et de relations avec Satan, ces pratiques.
Avant l’exposition du mort, il est baigné pour rentrer « dans le royaume, propre » selon certains.
Plusieurs recettes sont proposées. Nous constatons que le basilic est très utilisé ainsi que le vinaigre, le rhum et l’eau de Cologne. Le vinaigre sert à assouplir les articulations. Le basilic embaume le corps. La personne qui baigne le mort cachète les orifices du bas ainsi que le nombril (cire, girofle, chandelle).
Certains gardent l’eau du bain dans une cuvette placée sous le lit que le mort y soit exposé ou pas. Cette eau est jetée dans un lieu secret (un trou, ou au pied d’un bananier). D’autre jettent tout de suite l’eau du bain et la remplace par une eau propre. Il est dit que l’eau peut être contagieuse, peut rendre malade et surtout peut être utilisée par des malfaiteurs. Le bain terminé, le mort est habillé par la personne qui l’a baigné avec les vêtements, soit préparé par lui, soit choisis par les parents. Les chaussettes et les bas ne sont pas oubliés.
Puis on l’expose, les pieds en direction de la porte principale, sur le catafalque ou sur son lit recouvert d’un drap blanc en général brodé. Celui-ci peut appartenir à la famille ou être prêté par les voisins ou les amis. Le mort doit avoir un bel aspect. On le pare, on attache les chaussettes avec une épingle pour empêcher que les jambes ne s’écartent. Une assiette blanche contenant un pied à poule (herbe courante, de la famille des graminées), ou de la canne épluchée est parfois placée sur le ventre du mort pour éviter qu’il ne gonfle.
Les miroirs sont recouverts d’un tissu blanc pour empêcher qu’ils ne se tachent ou pour ne pas voir l’image du mort.
Une niche est faite à l’aide de plantes, de chandeliers, de tentures de couleur différente suivant l’âge, le sexe et la classe sociale du défunt. Dans la chambre est allumée en permanence et pendant 40 jours une lampe à huile. Avant la fermeture du cercueil, le corps est vérifié afin de s’assurer que rien n’y est caché. On enlève toutes les attaches pour ne pas indisposer le mort au cours de son « voyage ». Chacun lui rend un dernier hommage (baisers sur le front, pleurs et lamentations).
À la levée du corps, même si le mort n’a pas été exposé dans le bon sens, on ne le retourne pas dans la maison, sinon il entraînera d’autres membres de sa famille. Le père et la mère ne doivent pas accompagner leur enfant dans sa dernière demeure.
À la fin de l’enterrement, « on repasse déposer le mort chez lui ». C’est-à-dire qu’on rend une dernière visite à la famille. Diverses boissons sont servies, quelques gouttes de rhum sont jetées en guise d’offrande au disparu. Les vêtements et tout le linge qui ont servi au mort sont lavés et repassés après 9 jours.
Le deuil est porté par les proches et respecté suivant les croyances. En général pour une mère : 3 ans, dont 2 ans en noir, et un an en demi-deuil, pour un père : 2 ans (18 mois en noir, 6 mois en demi-deuil), une sœur : 1 an, une tante : 6 mois, marraine : 3 mois, un enfant : habits sombres. Tous ces rites concernant la mort sont suivis généralement par les personnes de religion catholique.

* à suivre *

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