PHILOSOPHIE - La Déduction - 2ième partie

Le psychologue étudie non pas le mode de pensée rigoureusement enchaînée dont le logicien établit les règles, mais la pensée concrète, réelle, par laquelle nous nous efforçons, par d’incessants tâtonnements de connaître et de comprendre un peu mieux les objets de connaissance qui se présentent à l’esprit.

Définir la déduction : l’opération par laquelle on montre que certaines propositions étant données, il en résulte d’autres propositions, c’est ne voir que la déduction faite : la déduction qui se fait est sensiblement différente.

Si nous réfléchissons un peu sur la façon dont nous raisonnons habituellement, il nous sera facile de nous en rendre compte. Supposons que je veuille prouver aussi rigoureusement que possible que le meilleur des gouvernements est la république, ou que la formation scientifique l’emporte sur la formation littéraire, vais-je d’abord considérer les données d’où la conclusion découlera nécessairement? Au contraire, c’est de la thèse à démontrer que je pars, et c’est elle qui me dirige dans la recherche et le choix des arguments qui la fondent. Un juge d’instruction ne procède pas autrement : il commence par affirmer, à titre d’hypothèse de travail, que tel individu présent sur les lieux du crime est le coupable; puis, aidé par ce fil conducteur, il rassemble tous les faits susceptibles de confirmer son hypothèse. La pensée vulgaire procède donc de la conséquence aux principes qui la justifient, non des principes aux conséquences qui en découlent.

Mais, objectera-t-on, si c’est bien là notre façon habituelle de penser, on ne saurait y voir une déduction. Sans doute, répondrons-nous, nous n’avons observé jusqu’ici que la déduction qui se fait. La déduction est faite lorsque l’esprit, partant des données recueillies à la lumière de la conclusion, constate qu’il y a entre les deux un rapport essentiel, que les faits observés sont inexplicables si la conclusion est fausse. Mais c’est dans les tâtonnements par lesquels on recherche des données qu’elle se fait.


Si donc nous voulions donner de la déduction une définition qui englobe les diverses opérations mentales qu’elle comporte, nous pourrions dire la déduction est l’opération mentale par laquelle on établit la vérité d’une proposition en la rattachant à d’autres propositions évidentes ou déjà démontrées.

Cette définition, qui décrit d’une manière satisfaisante le processus du raisonnement vulgaire, vaut aussi de la déduction scientifique et en particulier de la démonstration mathématique.

En effet, le travail le plus ordinaire du mathématicien n’est pas de déterminer les conséquences qui résultent de certaines conditions données. Ce qui est fixé au départ de la recherche, c’est la conclusion, ou plutôt le but à atteindre : trouver la forme de véhicule offrant le moins de résistance au vent, le mode de suspension grâce auquel un pont résistera à une charge de 20 tonnes réparties sur deux ou sur quatre roues…L’ingénieur, ensuite, cherche les moyens qui conditionnent ce résultat : il fait des hypothèses, c’est-à-dire esquisse des projets; il les étudie un à un, c’est-à-dire déduit, par le calcul, les propriétés des constructions projetées; ceux-là seulement sont retenus qui sont trouvés assurer le résultat demandé. Ici encore, au lieu de partir des données pour aboutir à la conclusion, c’est la conclusion qui constitue la véritable donnée primitive.

* à suivre *

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