PHILOSOPHIE - Vision Psychanalytique du Mensonge
Vision Psychanalytique du Mensonge
PUIS FREUD VINT…
En 1909, Freud, dans un excellent
article, assigne à la « fabulation » un déterminisme précis : la mise en doute
de l’image parentale accompagnée d’une surestimation de cette image. Dans la
théorie freudienne, les fantasmes prépubertaires servent à accomplir les désirs
dans un double dessein : érotique et ambitieux. À cette époque, l’activité
fantasmatique a tendance à se débarrasser de parents désormais dédaignés et de
leur en substituer d’autres, en général d’un rang social plus élevé. Puis, avec
la connaissance des processus sexuels, apparaît la tendance à se figurer des
situations et des relations érotiques. L’enfant bâtit alors un roman familial dans
lequel il ne craint pas d’inventer à la mère, objet de la curiosité sexuelle
suprême, autant de liaisons amoureuses qu’il y a de concurrents en présence.
Cette hypothèse vaut tant pour le mensonge chez l’enfant que pour les thèmes de
filiation fréquents dans les délires d’imagination – qui, pour Dupré, sont le
degré maximal de la mythomanie.
« Il est naturel que les enfants
mentent lorsque, ce faisant, ils imitent les mensonges des adultes », dit
Freud. Le mensonge est inhérent à l’évolution psychologique de l’enfant. Pour
celui-ci, comme dans la mentalité primitive, le langage a une valeur magique,
incantatoire. Freud a montré la portée de l’investissement du langage : le
tabou de certains mots, les lapsus, les oublis, mais aussi l’importance de la construction
même de ce langage. À mesure que son discours se déroule, le sujet se découvre
face à autrui ou prend conscience, dans le dialogue, de ses problèmes
personnels. Le langage s’enrichit par la relation et s’affermit par la
réalisation. C’est au-delà de trois ans que se fait l’apprentissage du
mensonge. Cette expérience est d’une importance déterminante dans l’évolution
psychologique. Utilisé d’abord de façon ludique, le mensonge n’a d’autre valeur
que celle d’une opposition à l’adulte, sans que l’enfant ne lui prête
aucunement le pouvoir de convaincre. Mais, un jour, l’enfant s’aperçoit que son
mensonge « prend »; il découvre que l’adulte, puisqu’il croit à son mensonge,
ne connaît pas sa pensée. Dès ce moment, les relations de l’enfant avec son entourage
sont transformées. Le mensonge est vérité. L’imaginaire peut être aussi vrai
que la réalité. Cette indépendance verbale est l’expression d’une tentative
d’indépendance beaucoup plus profonde. À noter que l’acte de mensonge est aussi
mécanisme de réassurance, de puissance ou de culpabilisation.
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