PHILOSOPHIE - Menteur, Moi et Vous, Donc?
PHILOSOPHIE
Menteur, Moi et
Vous, Donc?
Pour d’autres, c’est plus qu’une
arme, c’est une philosophie. Selon eux il est immoral d’abuser de la vérité.
Tristan Bernard est de ceux-là : «La vérité est la chose la plus précieuse que
nous ayions : économisons-là ! ». C’est pourquoi il y a tant de sortes de
menteurs. Il y en a tout un arc-en-ciel. « Il y a, dit François de Croisset,
autant de vérités de menteurs que d’espèces de papillons. Il y a l’homme qui
ment parce qu’il est bien élevé : celui-là, c’est l’homme du monde. Il y a
l’homme qui ment pour amuser les autres : celui-là, c’est un poète. Il y a
l’homme qui ment par devoir : celui-là, c’est un saint. Il y a l’homme qui ment
par intérêt, par égoïsme ou par lâcheté : celui-là, c’est un mufle. Il y a
l’homme qui ment pour le plaisir de mentir : celui-là, c’est un menteur. Enfin
il y a l’homme qui ment aux femmes : celui-là ne ment pas… il se rembourse ! ».
Historique de la Tromperie
L’importance de la tromperie dans
les affaires humaines est depuis longtemps reconnue par les philosophes
politiques, les analystes militaires, les dramaturges, les romanciers et autres
observateurs du comportement humain. La tromperie a été perçue comme centrale
dans les conflits inter-groupes, depuis les récits bibliques du siège de Ai et
la légende grecque du cheval de Troie jusqu’aux exemples modernes de Pearl
Harbour en 1941, de la Normandie en 1944 et de la Tchécoslovaquie en 1968
(Handel 1982, Whaley 1969). Ce fait est d’une telle évidence que l’on est tenté
d’abonder dans le sens de Sun Tzu, selon qui « toute guerre est fondée sur la
tromperie » ou de Churchill qui aurait dit qu’ « en temps de guerre, la vérité
est si précieuse qu’elle doit être protégée par un rempart de mensonges ». La
guerre est, sans contredit, l’une des manifestations les plus dramatiques de la
tromperie humaine, mais les dédales de l’intrigue politique, depuis les écrits
classiques de Machiavel pendant la Renaissance jusqu’à l’affaire du Watergate
ou l’Irak avec son nucléaire juré par Bush et les campagnes de « désinformation
» contemporaines, sont autant d’exemples de l’importance de la duplicité dans
la vie publique.
Selon les psychologues sociaux comme
Mead (1934) et Goffman (1959), les interactions sociales de la vie quotidienne
comportent un élément de tromperie, dans le sens où chaque acteur participe à
une mise en scène par laquelle il vise à contrôler les impressions qu’il crée
sur autrui. La vision la plus extrême de la tromperie dans la vie de tous les
jours est sans doute celle d’un sociobiologiste contemporain pour qui la
société humaine est « un réseau de mensonges et de tromperie qui ne persiste
que dans la mesure où il existe des systèmes de conventions définissant les
types de mensonges acceptables » (Alexander 1977). Poussée à l’extrême, cette
vision de la vie sociale humaine ne tient pas compte de la fonction vitale de
la communication fiable dans les rapports humains. Il est néanmoins concevable
que l’existence de la tromperie préméditée et la nécessité de détecter ce type
de machination et de manipulation aient pu constituer une impulsion majeure
pour l’évolution de l’intelligence chez les primates et l’espèce humaine (Byrne
et Whiten 1988, Humphrey 1976).
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