Au Compte-goutte - Mieux Comprendre Les Politiques Sociales, D'Hier à Aujourd'hui, 39ème Partie


Le premier élément de la stratégie de sécurité du revenu ce sera évidemment, sans détour, une stratégie économique de plein emploi, ainsi que cela était déjà le cas dans le contexte de la sécurité sociale, quoique de façon moins évidente :

« Le maintien d’un haut niveau d’emploi et d’une croissance économique forte et stable est d’une importance vitale. Sur le plan des politiques, rien ne saurait contribuer davantage à tirer les familles et les particuliers de la pauvreté que la conjugaison de politiques d’offre et de demande nécessaires à la création constante de nouveaux emplois et à une utilisation de plus en plus efficace de la main-d ’œuvre, des capitaux et des autres ressources productives. En l’absence de succès sur ce point, les autres mesures contre la pauvreté risquent fort de demeurer sans effet. » 208


Mais ce décloisonnement se manifestera aussi de façon très concrète, au niveau même des institutions, au niveau des structures prévues pour appliquer cette nouvelle stratégie globale d’emploi.

Ainsi, au plan institutionnel, l’affirmation explicite de la dimension économique, plus exactement, de la dimension gestion de la main-d’œuvre, favorisera une intégration encore plus poussée des mécanismes de l’emploi et des mécanismes identifiés traditionnellement comme étant de la sécurité sociale. Par exemple, on regroupera sous une même autorité, celle d’un nouveau ministère de l’emploi et de l’immigration, des programmes ou mesure telle l’assurance chômage, les programmes de création d’emploi « Programmes d’initiatives locales, ou encore d’emplois communautaires, ou de perspectives–jeunesse » … qui auparavant relevaient de différents ministères ministère du travail pour l’assurance chômage, ministère de la main-d’œuvre et de l’immigration ainsi que secrétariat d’État pour les autres ou encore de services différents au sein d’un même ministère. Désormais, tout sera regroupé de façon beaucoup mieux intégrée au sein d’une même structure administrative. De même en sera-t-il de la Commission d’assurance chômage, ainsi que nous l’avons déjà signalé, qui deviendra la Commission canadienne de l’emploi et de l’immigration et sera responsable non plus seulement du versement des prestations d’assurance-chômage et du contrôle de la disponibilité au travail des prestataires, mais aussi, du placement des travailleurs, du versement d’un « supplément de revenu » à certains travailleurs dont les revenus du travail sont insuffisants (notamment parce qu’ils ne travaillent pas à plein temps), de prestations à des travailleurs sans emploi qui entreprennent de suivre des cours de recyclage, ou encore des prestations à des travailleurs sans emploi qui accepteraient de travailler à des programmes d’emploi communautaire…   

On aura noté que le décloisonnement n’est pas seulement institutionnel… services de main-d’œuvre versus mécanismes de sécurité sociale… mais qu’il se manifeste aussi au niveau des bénéfices. Dans le contexte de la sécurité sociale, même si la dimension économique était déjà consciemment présente, il n’en demeurait pas moins une distinction formelle entre les travailleurs actifs d’une part et tous les autres qui pour un motif ou l’autre n’étaient pas présents sur le marché du travail. Les premiers relevaient des mécanismes ou services de main-d’œuvre, les autres relevaient du domaine de la sécurité sociale.

Avec l’avènement de l’idéologie de la sécurité du revenu, la distinction formelle perd sa raison d’être : désormais par exemple, un travailleur n’a plus besoin de quitter le marché du travail pour avoir droit aux prestations d’assurance -chômage. Désormais, le seul critère étant le niveau du revenu de l’individu (et sa disponibilité au travail dans les cas où on s’attendrait qu’il travaille), rien n’empêchera les mécanismes de sécurité du revenu de venir en aide à des travailleurs qui ne cessent pas d’être actifs…

Commentaires

Messages les plus consultés de ce blogue

LITTÉRATURE HAÏTIENNE - 4e partie

LITTÉRATURE HAÏTIENNE - 18e partie

LITTÉRATURE HAÏTIENNE - 8e partie