Messages

Affichage des messages du juin, 2012

LA PHILOSOPHIE - 9e partie

LA MÉMOIRE Le mot de Ravaisson : “c’est la matérialité qui met en nous l’oubli.” La mémoire, avec son double phénomène d’oubli et de rappel, est un des pouvoirs originaux de l’être conscient.  Aussi l’explication de l’oubli et de la conservation des souvenirs a-t-elle fréquemment sollicité l’intérêt et la sagacité des psychologues, spécialement touchant le rôle que joue en ces phénomènes le double élément de l’être humain : esprit et matière. Ravaisson prend nettement parti : “c’est, dit-il, la matérialité qui met en nous l’oubli.”  Après avoir brièvement commenté cette parole, nous essaierons d’en apprécier le contenu.” I - le sens de la phrase.  Il faut évidemment l’interpréter loyalement, c’est à dire dans le sens de l’auteur. A - Un sens possible, mais non exact.  Celui que pourrait donner à cette phrase un physiologiste, partisan de Ribot : l’oubli momentané est la condition du rappel; il suppose donc conservation : or cette conservation se produit par le jeu de...

LA PHILOSOPHIE - 8e partie

DESCARTES  ET  LA  MÉTHODE Descartes, dans la cinquième partie du Discours de la Méthode, différencie l’homme de l’animal par les deux traits suivants : le langage artificiel ou conventionnel et la faculté de s’adapter. Mais le langage artificiel consiste à « composer » les signes, c'est-à-dire à les ajuster les uns aux autres, à désigner, en définitive à les adapter. Pouvoir s’adapter était donc, pour Descartes, la caractéristique essentielle de l’homme, le signe de l’intelligence ou de la raison : «  au lieu que ces organes (des animaux) ont besoin de quelque particulière disposition pour chaque action particulière », la raison est un instrument qui peut servir en toutes sortes de rencontres. Les philosophes ont repris cette idée et voient volontiers dans l’intelligence la fonction qui adapte des moyens à des fins. Cette définition est-elle parfaite? D’abord convient-elle à tout le défini, et l’intelligence a-telle pour fonction unique, d’a...

LA PHILOSOPHIE - 7e partie

VIE PSYCHIQUE VS CORPS Peut-on étudier la vie psychique sans se préoccuper du corps. I- Pour avoir des connaissances psychologiques sûres et utilisables dans la vie, point n’est besoin de se mettre à l’école du physiologiste: il suffit de s’observer soi-même et d’observer les autres. a) Ainsi, pour étudier le processus de la formation des idées, de l’évocation des souvenirs, de la genèse du raisonnement, on ne voit pas qu’il soit utile de connaître les phénomènes de l’assimilation ou de la respiration. b) La vie affective est sans doute assez intimement liée à la vie organique; mais l’introspection suffit pour établir entre l’affectivité et la pensée des rapports très intéressants. c) Enfin, suivre le cheminement de l’esprit qui aboutit à la décision volontaire est encore affaire d’observation intérieure, et l’étude du corps n’y est guère utile. II- Cependant, si on peut avoir de l’homme une connaissance très utile sans se livrer à des études proprement physiologiques, aucun psychologu...

LA PHILOSOPHIE - 6e partie

Montaigne et son jugement “Ce grand monde est le miroir où il faut se regarder pour se bien connaître” “Connais-toi toi-même”, tel est le premier précepte que Socrate donne au philosophe, et cette connaissance de soi, point de départ de la connaissance universelle qu’était alors la philosphie, c’est l’introspection qui, semble-t-il, doit la donner.  Montaigne a émis un avis différent: “Ce grand monde....”. Comment comprendre ce jugement et quel est ce grand monde dont l’observation nous amènera à une juste connaissance de nous-même?  On pourrait d’abord comprendre que ce grand monde c’est l’univers physique. Et, de ce fait: nous sommes nous mêmes composés des divers éléments de cet univers; ensuite, voyant notre place dans cet univers, nous connaîtrions notre importance relative. Mais il ne semble pas que ce soit là la pensée de Montaigne:  d’abord, en plus des éléments que nous observons dans l’univers, il y a en nous la conscience, la pensée, qui constituent notre carac...

LA PHILOSOPHIE - 5e partie

La RocheFoucauld (Philosophie) La RocheFoucauld on le sait, explique toute l’activité humaine par un seul mobile: l’amour propre.  Il prend un malin plaisir à soulever le voile de vertu dont se parent nos actions et à faire apparaître le calcul intéressé qui, selon lui, commanderait à notre insu toute notre conduite : “L’intérêt parle toutes sortes de langues, et joue toutes sortes de personnages, même celui du désintéressé”: “la haine pour les favoris n’est autre chose que l’amour de la faveur....”.  “Ce qu’on nomme libéralité n’est le plus souvent que la vanité de donner...”. Dans ses Maximes abondent les réflexions, pleines de finesse et d’humour qui nous font sourire des autres et de nous-mêmes: “nous avons toujours assez de force pour supporter les maux d’autrui”; “il en est du véritable amour comme de l’apparition des esprits: tout le monde en parle, mais peu de gens en ont vu”; “quel que bien qu’on dise de nous, on ne nous apprend rien de nouveau”. Ces observations mali...

LA PHILOSOPHIE - 4e partie

L'ASSOCIATION DES IDÉES Pour se faire une idée juste de cette fonction très générale qu'on appelle d'une façon uniforme "association des idées", le procédé le plus simple et le plus objectif paraît être d'envisager d'abord un certain nombre de ces cas, d'associations mentales, et d'examiner ensuite, par une analyse détaillée de ces faits, comment ils sont expliqués, soit par une sorte d'automatisme qui laisse le sujet lui-même plus ou moins passif, soit, au contraire, par une activité mentale personnelle du sujet. Quelques faits A) On en trouve de genres très divers Chacun de nous possède certainement de nombreux exemples personnels.  Tel site, par exemple, nous rappellera un événement de notre vie passée qui eut une relation avec lui : le souvenir d'un événement social qui se passa alors, le visage de tel camarade que j'y rencontrai; ou bien: la pensée du loa d'Erzulie éveillera en moi celle de la vierge Marie; la montagne évoquera...

LA PHILOSOPHIE - 3e partie

Lamartine  et les¨ Méditations¨.  Théophile Gauthier a retracé l’impression de nouveauté et d’émerveillement que causa en 1820 la publication des Méditations : une révélation de la poésie dans son essence : Ce volume fut un évènement dans les siècles. Il contenait tout un monde nouveau, monde de poésie plus difficile peut-être à trouver qu’une Amérique ou une Atlantide. Tandis qu’il semblait aller et venir indifférent parmi les autres hommes, Lamartine voyageait sur des mers inconnues, les yeux sur son étoile, tendant vers un rivage où  nul n’avait abordé et il en revenait vainqueur comme Colomb, il avait découvert l’âme. On ne saurait s’imaginer aujourd’hui, après tant de révolutions, d’écroulements et de vicissitudes dans les choses humaines, après tant de systèmes littéraires essayés et tombés en oubli, tout l’excès de pensée et de langage, l’enivrement universel causé par les¨ Méditations¨. Ce fut comme un souffle de fraîcheur et de rajeunissement comme une ...

LA PHILOSOPHIE - 2e partie

ROUSSEAU ET LE SENTIMENT DE LA NATURE  On discute encore quelquefois l’inutile question de savoir qui des deux, de Diderot ou de Rousseau, a comme qui dirait le premier, « retrouvé » cette idée de « nature » contre laquelle trois ou quatre générations d’écrivains et de penseurs avaient jusqu’à eux si vigoureusement réagi? Admettons que ce soit Diderot, et, aussi bien, puisqu’il en a revendiqué la gloire, admettons qu’il ait « pâli » sur les premiers ouvrages de Rousseau, il eût  donc bien fait, en tout cas, de nous expliquer comment aucun de ses ouvrages à lui, Diderot, n’a produit la même impression « d’admiration et de terreur universelle » que les deux premiers discours de Rousseau. Mais la vérité est qu’en s’emparant de cette idée de « nature », Rousseau en a saisi toutes les conséquences, y compris celles que l’imagination trop fuligineuse et trop prompte de Diderot n’avait point vues; il l’a faite sienne, vraiment sienne,...